Ethiopie - 2008

10/11/08
Au départ de Toulouse, j’apprends quelques mots d’amharique, mais mon cerveau refuse d’aller plus loin.
Les hôtesses de Lufthansa nous présentent les consignes de sécurité en allemand, en anglais et en français. Cela doit être tellement ennuyeux que lorsque l’on passe au français, l’hôtesse a déjà disparu et il ne reste que la voix-off.
Porte 43, ma carte d’embarquement en poche, je me rappelle qu’en prenant l’avion lors de mon premier voyage à New York, je m’étais assis à côté d’une Ethiopienne à qui j’avais parlé de mon envie de découvrir son pays. La discussion s’était arrêtée là et nous avions dormi tout le trajet.
Mon voisin est congolais.
11/11/08
La terre jusqu’à la ligne d’horizon est noire. Fine bande de ciel lumineux (orange, jaune, blanc et bleu) pour retrouver un noir profond plus haut.
Première sensation dans le taxi qui m’amène à la gare de chemin de fer : me voilà de retour en Afrique.
Aucun train ne part d’Addis Abeba, pour cause de travaux sur la voie.
« Addis Abeba Restaurant », rencontre avec Getachew qui travaille chez Ethiopian Airline. Nous décidons de partir ensemble pour le musée d’Addis Abeba. Petit clin d’œil à Lucy abandonnée à la poussière. Nous poursuivons par la visite des lions dans un zoo non loin de là. J’ai été son hôte tout l’après midi, quelle grande classe de sa part. Il me raccompagne jusqu’au Taïtu Hôtel.
Déambulation dans les rues autour de l’hôtel. Accueil très désagréable au restaurant italien « Castelli », je prends un taxi direction le buffet de la gare. Les clients sont italiens, mais je m’assois tout de même au bar et je commande un whisky sec puis deux. La cuisine est aussi italienne. Je ne mangerais pas.
12/11/08
Réveil à 4h30 pour sauter dans un taxi direction la gare routière et trouver une place dans un bus. Des enfants courent au milieu de l’autoroute, d’autres font des exercices de combat. Trajet à la fois long et merveilleux.
Mon voisin me tape sur l’épaule pour que je prenne en photographie une famille de singes traversant la route. Nous mangeons ensemble lorsque le bus s’arrête enfin à mi-trajet.
Arrivé à Dire Dawa, je pars en taxi à trois roues au Mekonnen Hôtel en face de la gare. Direction ensuite l’ambassade de Djibouti où l’on me demande 36$US en coupure de 10, 5 et 1$. Lorsque j’arrive à la banque pour échanger mes billets de 5$, la porte se ferme pour la fin de journée. Direction la gare où les cheminots restaurent de vieux wagons en bureaux et en chambres. Le train est prévu en fin d’après midi le lendemain.
Première bière de Harar en compagnie du patron de l’hôtel face à un écran géant installé devant la gare et diffusant des séries américaines sous-titrées en arabe. Installation réalisée pour le passage à l’an 2000 éthiopien, c’est à dire, il y a un an.
13/01/08
Rencontre avec Monsieur Fassil et Madame Tourouwork des chemins de fer. On me présente aussi à Monsieur Joseph Petros directeur de l’alliance française de Dire Dawa.
Le train pour Djibouti fait le trajet de nuit, alors j’abandonne l’idée et je pars au marché de Kafira. Rencontre avec Yetenoyet qui m’invite à prendre le café dans sa maison.
Retour vers le Mekonnen Hôtel, sur mon chemin je prends quelques photographies chez un coiffeur.
Le train n’est finalement pas parti aujourd’hui, il transportera des chameaux demain matin.
Alliance française, je présente mon projet « Epouse Rimbaud » à Joseph. Il me fait rencontrer un anthropologue français, Thomas. Quelques bières et nous partons manger ensemble dans un restaurant.
14/11/08
Minibus direction Harar. Mes bagages au Ras Hôtel, je file à la maison Arthur Rimbaud après avoir bu un Coca Cola au bar « Segon… ».
Petit passage au marché à viande. Tête de chameaux que les mouches s’arrachent au soleil. Vautours plongeant sur les morceaux de viande jetés par les bouchers. Les guides sont partout.
Au marché Oromo, des enfants jouent au ping-pong. Je perds ma première partie 21-13. Plus tard, je joue au jeu de la pièce dans la main avec des enfants amusés. Puis, je leur montre des tours de jonglage avec des cailloux : ils se regroupent, ils sont émerveillés. Enfin l’un d’eux me montre son livre d’anglais. Lorsque je finis une phrase à haute voix par « lion », je leur imite le cri de l’animal. Ils sont aux anges. L’un de dit « money » et un autre lui répond aussitôt « not him ! ».
En remontant sur Charleville Street, je récupère les photographies d’identité en N&B argentique que j’ai fait faire chez un petit photographe.
Le soir, je vais au spectacle touristique du repas des hyènes. Ces bêtes sont vraiment émouvantes.
15/11/08
Je passe devant un bâtiment, une chaise abîmée est abandonnée contre un mur. Lorsque l’image sort du Polaroïd, un policier en moto s’arrête et m’interpelle violemment. Je vais jusqu’à l’entrée du bâtiment, accueilli par cinq militaires très énervés. On me confisque l’image. Il s’agissait du palais ministériel de Harar.
En revenant de la poste, je m’arrête devant un restaurant-boucherie où des jeunes hommes consomment un mètre de bière. On se regarde en souriant et je suis invité à m’asseoir et boire avec eux. Viande crue avec du citron et des piments. Nous partons dans un gros 4X4 (comme ceux de l'ONU qui circulent sur les pistes à vive allure laissant la population locale dans le poussière) direction Babillé pour consommer du Khat. Le soir, en pleine nuit, alors que Tedros me ramène sur Harar, nous crevons un pneu. Je change la roue, allongé dans la poussière et éclairé par ma frontale. Nous repartons. Après une douche à l’hôtel, il me récupère, et nous partons boire et danser dans un restaurant de la ville.
16/11/08
Je retrouve les joueurs de domino sur la place principale de Harar. Je perds ma partie lamentablement (la veille, ma partie de billard n’était pas meilleure). Après une partie de baby-foot sur un des marchés, je rejoins mes amis de Babillé au restaurant-boucherie.
Nous partons chez Michael, sa femme nous a préparé un délicieux repas avant qu’ils se mettent à mâcher du Khat. Tedros me conduit au restaurant « Fresh Touch » où je dois rencontrer le frère du patron pour lui parler de mon projet « Epouse Rimbaud ». En sortant de la maison, trois jeunes filles nous attendent avec des valises, nous partons. Sur la route, je demande à Tedros de leur proposer de participer au projet. Elles acceptent. Demi-tour direction Awaday à la recherche d’un bananier. Nous emmenons ensuite les jeunes filles à leur université. Au retour, il me dépose en amont de la ville et plus tard, j’oublie de passer au « Fresh Touch », tant pis.
Nouvelle partie de domino avec un joueur qui cette fois m’apprend non plus à jouer mais à gagner. Je le retrouve d’ailleurs par hasard un peu plus tard dans son salon de coiffure.
« Fresh Touch », il est environ 19h00 quand je retrouve mes amis. Je propose à Wondossen (le frère du patron) de prendre le petit déjeuner ensemble au Ras Hôtel. Après quelques autres bières dans un bar de nuit, je décide de rentrer me coucher.
17/11/08
Personne pour le petit déjeuner. Je laisse mon sac à l’hôtel et prends un minibus pour Babillé, direction le marché aux chameaux. Le trajet est laborieux et à mi-chemin, pneu crevé. On sort du véhicule, le soleil cogne. Je vois arriver un 4X4 et je tente ma chance en tendant la main. La voiture s’arrête. La porte s’ouvre et je reconnais le troisième ami du Khat de samedi. Nous nous saluons comme des vieux potes et je monte dans la voiture. Il a l’air bien fatigué et dort tout le trajet. Son chauffeur s’arrête pour acheter du Khat, dépose mon ami à sa maison et nous repartons tous les deux vers Babillé à la recherche du marché. Nous sommes un peu perdus et un enfant monte dans la voiture pour nous indiquer le chemin. Il m’accompagnera au marché. Au retour nous buvons un Coca Cola.
Avant de reprendre la route, il préférera 10 birrs à un portrait au Polaroïd. Le trajet se passe dans une atmosphère très détendue.
Je fais mes adieux à Harar.
Dire Dawa, il commence à faire nuit et le Mekonnen Hôtel est plein. Je laisse mon sac dans le bureau et vais chercher un hôtel en attendant que le patron revienne. Tout est trop cher. Le patron ne me propose pas la terrasse comme je le pensais mais le petit bureau.
Je retourne à l’alliance française espérant dire bonjour à Thomas, il n’est pas rentré. Je bois une bière avec les français et les françaises à côté du terrain de pétanque. Nous partons manger dans un restaurant pour expatriés, changement d’atmosphère.
Retour au Mekonnen où je discute un peu avec le patron avant de rejoindre le bureau où un petit matelas a été disposé par terre.
18/11/08
La nuit fut un peu étroite. Je prends mon petit déjeuner dans un café sur le trottoir quand Thomas se présente face à moi. Nous prenons un café, deux cafés, trois cafés ensemble. Cela me fait plaisir de le revoir enfin. Il prend l’avion pour Addis Abeba ce midi.
Je prends un taxi pour le « Taiwan Market ». Au retour un taxi m’offre le trajet.
En me perdant dans les rues moins fréquentées, je tombe sur un bar à Tedj. Une bouteille, deux bouteilles et mes amis de table sont bien excités, ils oublient l’appareil photographique que je pointe sur eux. L’alcool me monte aussi au cerveau et je quitte le lieu pour aller manger un morceau.
De retour à l’hôtel, je passe un moment avec le patron et un ami de Djibouti avant d’aller faire une sieste dans ma nouvelle chambre.
Je dors très mal et au réveil, je vais vomir. Un peu patraque, je vais à la gare pour le départ du train prévu à 17h00. Un retard d’une heure est déjà annoncé alors qu’ils assemblent seulement les wagons. Une foule d’éthiopiens est assise devant la gare. Je ne me sens pas bien et je retourne vomir à l’hôtel. Je décide de rester dans ma chambre. C’est vers 20h00 (le train n’est toujours pas parti) que la fièvre monte, que les vomissements se succèdent. Mon estomac est vide et je n’accepte même plus le Coca Cola.
Impossible de trouver une banane dans la rue et je n’ai pas la force de m’asseoir à la table d’un restaurant. Commence alors une agonie terrifiante et douloureuse dans ma chambre. Je ne peux pas fermer les yeux, des courbatures partout et mon corps qui se vide de toute son eau.
Je réalise que si cette déshydratation annoncée dure (refus de tout liquide), il va falloir aller à l’hôpital, renoncer à la suite du voyage.
Vers 2h00 du matin, je me réveille, ravi d’avoir dormi quelques heures, j’accepte à nouveau le Coca Cola, espoir.
Le train n’est toujours pas parti. Je reprends alors quelques médicaments, mets des boules-caisse pour atténuer les boums boums de la boîte de nuit d’à côté et je me rendors.
19/11/08
Je suis sauvé. Je vais acheter des bananes et je prends mon petit déjeuner non loin du Mekonnen. En redescendant de ma chambre, je croise l’ami de Djibouti et le patron, nous discutons un moment avant que j’aille manger au Paradiso. Je ne marche plus dans Dire Dawa comme avant. La fatigue, le ventre encore fragile, je me sens agressé par le soleil, le bruit et les odeurs. Je passe le début de la soirée avec le patron, l’ami de Djibouti et deux autres Ethiopiens.
20/11/08
Levé à 4h00 pour prendre le bus direction Addis Abeba. Les bars de nuit sont encore ouverts. A un tiers du parcours, le bus s’arrête. Plus de pression dans les freins. Démontage, remplacement des joints, nous repartons.
Le trajet paraît très long et à proximité de la capitale, de nombreux arrêts, contrôles de police. Des vendeurs de miel sur le bord de la route au niveau de Debre Zeit.
Arrivée tardive dans la soirée. Je prends un taxi avec Fabienne qui travaille pour une ONG, rencontrée dans le bus en compagnie de Julien, un artiste en résidence à Dire Dawa et qui a passé quelques semaines à faire des aquarelles à Harar. Discussion très musclée avant que le taxi parte, un bagagiste réclame son argent alors qu’on ne lui a rien demandé.
Taïtu Hôtel, ma nouvelle chambre est splendide. Je dîne avec Fabienne chez Castelli. Quel bonheur de redécouvrir des saveurs connues, la demi-bouteille de vin est un enchantement. Retour dans le froid des nuits d’Addis Abeba.
21/11/08
Il n’est pas nécessaire d’obtenir une autorisation particulière pour circuler dans la vallée de l’Omo. Je passe au Sheraton Hôtel pour retirer de l’argent. C’est un moment très agréable, retour au calme. Jardin, fontaines et piscine, un véritable palace.
Montée en minibus (au moins trois) vers Entoto. Vue sur Addis Abeba et visite d’un petit musée près de l’ancienne demeure de Ménélik II. Des femmes portent, en descendant de la montagne, des charges hallucinantes de branches d’eucalyptus. Au retour, petite ballade dans le parc de l’université de Addis Abeba.
Vers 20h00, Aurélien de l’ambassade de France, vient me chercher avec sa femme éthiopienne au Taïtu Hôtel pour aller dîner au Fasika, dances et injera géante.
Nous retrouvons des personnes de l’alliance française au bar « Le bateau ivre » qu’Aurélien a décoré avec le patron.
Nous rentrons ensuite dans un Bet ou des Asmaris nous offrent un spectacle extraordinaire. Le danseur Melaku Belay, ancien enfant de la rue, se produit notamment en Europe.
Retour au « Bateau ivre » pour une dernière bière en compagnie du patron avant d’aller se coucher.
22/11/08
Après un délicieux jus de fruit près de Arat Kilo, je vais lire dans le jardin du Sheraton.
« She’s a lady… » chante en boucle la bande musicale du restaurant « Le jardin » que j’ai enfin trouvé au bout de la ville.
Dans l’après midi, je partage un moment avec des gamins jouant à taper dans une balle attachée par une ficelle à un poteau électrique. La police suspend le jeu et m’avertit du danger à rester dans le quartier. Je suis pourtant tout près de mon hôtel.
A la recherche d’une enveloppe, je rencontre un avocat buvant des gin tonic sur la terrasse d’un bar restaurant. Nous discutons et passons un agréable moment.
En début de soirée, Thomas me rejoint dans le hall de l’hôtel. Nous quittons une horde de jeunes touristes anglais un peu trop bruyants à notre goût pour prendre une bière à côté dans le plus grand bordel à ciel ouvert de Addis Abeba. Les prostitués passent les unes après les autres devant nous, ajustant leurs habits, avant d’attaquer la journée.
Francis Falceto, un ami de Thomas, nous rejoint. Au cours de la discussion, je m’aperçois qu’il est le traducteur des Nuits de Addis Abeba de Sebhat, que j’avais lu avant de partir. Sebhat est considéré comme le Bukowski éthiopien. Il vient aussi chercher les perles du jazz éthiopien.
Nous partons manger un morceau de viande chez un boucher un peu plus haut dans le Piazza. Un anthropologue et son caméraman de Marseille nous rejoignent. Ils ont passé un mois dans le pays Maalé à l’Est de la vallée de l’Omo.
Nous partons tous dans un bar à Katikala, alcool très fort à base de céréales. Cet établissement est en fait un ancien container de paquebot. Nous sommes assis face à face sur deux rangées. Nous partons avant que les locaux soient trop excités par l’alcool.
Mes amis prennent un taxi pour continuer la soirée, je rentre me coucher à l’hôtel car le réveil sera très matinal.
23/11/08
Le soleil se lève sur l’aéroport de Addis Abeba, il est 6h00 du matin. En montant dans le bus qui nous amène à l’avion à hélices, un Fokker 50, je suis appelé par le haut-parleur de l’aéroport, c’est chic. Une partie de mon billet n’avait pas été récupéré par les services de l’aéroport.
A l’arrière de l’avion avec un micro, l’hôtesse lit son petit cahier écrit à la main, nous donnant les instructions habituelles avant le décollage.
Les lacs de Abya et Chamo en arrivant sur Arba Minch surprennent par leur couleur orange.
La ville elle-même n’a aucun charme, en revanche les montagnes et les lacs qui l’entourent sont splendides.
En buvant un jus de fruit, je discute avec un homme qui amène sa fille à l’université.
Je prends ensuite un café avec Boubou qui travaille à la station de bus. Ses renseignements me rassurent sur la faisabilité de mes projets. En revenant de la ville basse, je marche jusqu’au Bekele Hôtel pour découvrir une vue exceptionnelle sur les deux lacs. La terrasse est remplie d’anglais du troisième âge. Les tables sont déjà prêtes pour le dîner.
Je retourne au Soma Restaurant, que j’ai découvert ce midi, pour de délicieux « fish ribs ».
Dans une salle de jeu, des jeunes gens jouent à une sorte de pétanque-billard que l'on nomme Carambola où les boules sont lancées avec les mains. Une boule bleue sert de cochonnet et deux joueurs tentent chacun avec ses boules d’être au plus près de ce cochonnet en jouant des rebords de la table. Je n’ai pas compris à quoi servaient les trois pièces en plastique au centre. Tout le monde commente les coups des joueurs.
24/11/08
Je redécouvre le chant des oiseaux le matin. Direction Dozé et son marché. Avant de prendre le bus, je passe prendre quelques bateaux dans un café.
Rencontre avec deux Polonais qui attendent depuis une heure dans le bus. Nous partons.
Ballade autour du village avant que le marché s’installe. Coton, laine de toutes les couleurs, épices, araki artisanal.
Après un copieux repas (légumes et poisson) au Soma Restaurant avec un des Polonais, nous partons au Crocodile Market avec un couple d’américain. La ballade en bateau est reposante mais les quelques têtes d’hippopotames sortant de l’eau et la dizaine de crocodiles baillant au soleil sur une petite plage de rochers ne sont pas spectaculaires.
Retour à Arba Minch pour un jus de papaye.
25/11/08
Je quitte l’Abyssinia Pension pour rejoindre le Tourism Hôtel à Sikela (ville basse) qui sera plus près de la station de bus du lendemain.
Le bus pour Chencha est pratiquement vide. Je préviens le chauffeur que je commence le chemin à pieds et que je prendrais le bus en route. Je ne veux pas attendre deux heures à côté du bus.
En quittant Arba Minch, un camion m’emmène jusqu’à la rivière à la sortie de la ville. Là, je marche deux kilomètres avec des champs de bananiers de part et d’autre de la route. Je monte ensuite derrière une moto qui me conduit jusqu’à l’université.
Je reprends ma marche en faisant quelques détours en bordure des champs. Un jeune homme me propose de visiter son champ de bananiers. Il coupe un régime d’une quinzaine de bananes vertes qu’il m’offre. Nous faisons quelques kilomètres avec les bananes sur le porte-bagages de son vélo quand soudain j’aperçois le bus. J’abandonne mon ami.
Dans le bus les gens rigolent de me voir avec mon régime. Tichti est assise à côté de moi. Nous discutons jusqu’à la fin du voyage. Il fait frais à Chencha, après le marché très coloré et varié, piments, oignons, racines d’ensète, pomme de terre, tabac et patte d’ensète fermentée, je croise Tichti avec un de ses amis et nous allons manger un injera avant que je reprenne le bus. Retour à Arba Minch.
26/11/08
4h45, une foule est calée contre la grille de la station de bus attendant l’ouverture des portes. A 5h00, les portes s’ouvrent et les gens courent vers le bus écrasant presque ceux qui tombent par terre. Boubou est là et je lui fais mes adieux en le remerciant.
Assis dans le bus, seules les jambes dans la lumière des phares sont visibles. Encore beaucoup d’agitation avant le départ. Les montagnes se dessinent à l’horizon. Odeur de carburant.
Arrivé à Konso, je croise mes amis Polonais. Un couple de marseillais monte dans le bus. Le trajet est un peu long et lorsque l’on arrive enfin à Key Afar, j’en oublie de descendre du bus. C’est Emmanuelle qui m’indique que nous sommes arrivés.
Un petit tour autour du village, premier contact avec les Bannas. J’en retrouve plus tard en haut du village buvant une sorte de bière chaude de couleur grise dans des calebasses.
Le soir, une injera aux légumes partagée avec les marseillais.
27/11/08
Au petit matin, le petit garçon du patron de l’hôtel m’amène manger des spaghettis pour mon petit déjeuner. Je rencontre des Bannas sous un arbre, l’homme mange du maïs bouilli et bois une étrange boisson dans une calebasse. Les Bannas sont au rendez-vous pour le marché.
Frew, un gamin sympathique du village devient mon assistant photographe.
Départ pour Jinka dans l’après midi, je me bats pour rentrer dans le bus. Je dis au revoir à Frew qui doit normalement se rendre à Jinka le lendemain.
Le conducteur met une cassette de Michael Jackson pour me faire plaisir. Derrière moi, un Banna un peu excité, debout près de la porte, se met à danser sur le rythme de la musique. A mi-trajet, on s’aperçoit qu’il n’a pas assez d’argent pour payer le bus. Le chauffeur essaye de le faire sortir, mais il résiste. Il quittera le bus au village suivant. Je m’occupe à présent de la musique, changeant les cassettes et coupant le son à chaque arrêt du bus.
Arrivé à Jinka, je prends une chambre au Goh Hôtel.
Nous sommes à 1400 mètres d’altitude et la végétation est plus dense qu’à Key Afar.
En me baladant, le magasin Photo Top me fait un clin d’œil. J’y rencontre un inspecteur de police de Addis Abeba, qui m’interroge sur les motivations de mon voyage en Ethiopie. Dîner au Hirot Hôtel en compagnie des marseillais, des polonais, une australienne et une fille d’Alaska. Ils partiront tous ensemble en 4X4 le lendemain visiter un village Tursi.
28/11/08
Petit déjeuner au Tsyion II de l’autre côté de la ville, trajet en moto à trois roues, très remuant.
Je pars à pieds vers la colline, pour traverser la rivière des enfants m’installent des pierres et me tiennent la main. Après une belle ascension, je m’assoie un moment à l’ombre d’un arbre, découvrant la vallée de Jinka. En reprenant mon chemin, je m’arrête à une maison, un des enfants me propose de m’accompagner jusqu’à Jinka alors qu’il va à l’école.
Plus tard dans la ville, un quartier encore excentré, des enfants me proposent de jouer au baby-foot. J’accepte et avant de me mettre au jeu, je sens quelque chose sur ma jambe droite, je me retourne, une main a plongé dans ma poche et en sort difficilement tout mon argent. Je prends in extremis l’argent dans la main du gamin. Ils étaient trois, l’un d’eux reçois un coup de pied dans les fesses alors que les autres sont déjà loin. Max Pam remerciait également, face aux pickpockets, les grandes poches qu’ont ces pantalons militaires.
Je découvre l’ancienne piste de l’aérodrome, un vaste pâturage en plein milieu de la ville. Dans l’après-midi, alors que je suis assis sur la terrasse de l’hôtel, Frew me fait la surprise de son arrivée à Jinka. Nous partons en ville, il achète deux énormes samousa aux « black beans » que nous dégustons sur le chemin. Nous tombons sur un petit marché de fruits et légumes où nous reprenons notre association photographique tout en goûtant à quelques fruits. De retour sur l’aérodrome, je m’avance pour prendre les joueurs de football en photographie. Les enfants me proposent de jouer, puis voyant que je pointe mon appareil vers eux, ils décident de m’écarter du terrain. Soudain dans une action, un joueur éclate le ballon d’un coup de pied. Alors tous les gamins se précipitent vers moi me demandant de leur acheter un nouveau ballon. Je leur explique qu’ils doivent tous être responsables du ballon et que chaque joueur doit participer à l’achat d’un nouveau ballon. Ils forment une équipe ou non. Regroupés autour de moi, je mets 2 birrs sur la pelouse (un pour ma participation et un pour celle de Frew) et je leur demande de faire pareil. Ils sont une vingtaine mais nous obtenons que sept birrs. Alors qu’un gamin prend cette somme dans les mains, j’aperçois un autre qui lui reprend un birr pour le mettre dans sa poche. J’interviens, récupère les sept birrs, reprend à mon tour les deux birrs de notre participation, Frew et moi, et je leur explique qu’ils ne sont ni corrects ni solidaires. Le jeu est fini et je m’en vais plus loin. Deux joueurs me rejoignent et me disent en passant qu’ils apprécient vraiment ce que j’ai essayé de faire.
A 19h00, mon ami policier me retrouve comme prévu à l’hôtel, je suis sur la terrasse sirotant une bière avec des touristes. Il ne souhaite pas rester et me propose de revenir dans cinq minutes. De retour, il m’annonce qu’il a un travail à réaliser et qu’il reviendra me chercher après. Je ne le reverrais pas de la soirée. Je pars manger une injera dans la ville. De retour Frew est toujours là avec l’australienne et sa copine. Son ami l’a abandonné, il dormira donc dans le deuxième lit de ma chambre. Je préviens tout le monde pour éviter tout malentendu.
29/11/08
Visite du musée de Jinka sur la colline. Travail impressionnant de Ivo Strecker. De retour en ville, je me rends au marché et achète tout d’abord quelques fruits (ananas, fruits de la passion). Frew me retrouve et nous faisons quelques photographies de Mursi. Nous mangeons ensemble une délicieuse injera.
Après avoir pris mon billet à la gare de bus, je pars khater pour tuer cette chaude après midi. Je quitte mes amis pour le marché à nouveau, mais je me rends compte que le marché a perdu de son activité.
Je salue un jeune homme blanc près d’un 4X4. Nous discutons un moment et décidons de poursuivre notre déambulation ensemble. Jean-Baptiste est anthropologue, il est accompagné par deux Mursi, Olisirwa et Damtori. Cela fait un mois qu’il vit et étudie dans leur village. Nous sommes à présent à la recherche de cloches pour leurs vaches. Ils me donnent le surnom de Manumello. Nous prenons, avant de nous quitter, quelques bières au Salam.
Je retourne à l’hôtel et remercie une dernière fois Frew avant de préparer mes affaires pour mon départ.
30/11/08
Arrivée à Konso vers l’heure du déjeuner, c’est le jour de la viande. La nuit précédente fut courte, insomnie causée par le Khat et puis une femme a crié pendant dix minutes, tout l’hôtel s’est réveillé, je suis resté au lit. Pas de lumières à cette heure de la nuit. Je suis un peu fatigué.
En me renseignant pour le bus de Yabelo, je rencontre quelques personnes assises à boire de la bière de Harar. Lorsque je demande si quelqu’un parmi eux parle et comprend l’anglais, une seule personne lève timidement le doigt en souriant. Il s’agit de Danié, il a 61 ans.
Je me rends compte par la suite que seulement deux personnes parlent anglais. Danié n’y comprend rien.
Nous entamons une discussion sur le prix de la bouteille de bière vide en comparaison au prix de la bouteille pleine consommé dans ce bar car je souhaite récupérer une bouteille de bière de Harar. La confusion entre « beer » et « birrs » nous amènent à discuter pendant un bon moment. Finalement je ne prends pas de billet et nous partons dans un autre bar pour discuter des prix locaux et des prix « farenja » pratiqués en Ethiopie.
Un petit tour dans la ville où les enfants crient plus qu’ailleurs « you, farenja, where are you go, what is your name, money, one birr ». Je mets des cailloux dans mes poches et leur distribue, ils rient beaucoup en découvrant que je ne donne pas des birrs mais des cailloux. Je continue en lisant sur la terrasse de l’hôtel. Après avoir dîné, je rejoins la table de mes amis de l’après-midi. Un professeur de Chimie me pose beaucoup de questions. Je les quitte car je suis maintenant très fatigué par la nuit passée et par le transport en bus, il n’est pas très tard.
01/12/08
J’ai pris mon billet de bus tôt ce matin et je déjeune tranquillement sur la terrasse de l’hôtel ombragée par un bel arbre. Le bus partant à 11h00, je ne verrai qu’une petite partie du marché. Je discute avec un enfant, le DJ de l’hôtel, quand un 4X4 passe dans la cour. Il leur demande de m’emmener vers Yabelo. Le tarif est identique à celui du bus. Je me fais rembourser, non sans difficulté, en interpellant de très belles femmes policières. L’argent en poche, je monte en voiture en donnant un billet à l’enfant pour son aide. Les paysages traversés sont magnifiques.
A Yabelo, après avoir posé mes affaires dans un hôtel que m’avait conseillé les marseillais, je me rends au petit marché que j’avais remarqué en arrivant. Je monte ensuite sur une colline et finit mon livre « Reflets dans un œil d’or » de Carson Mc Cullers perché dans un arbre. Après le dîner cher un boucher, je retrouve Wubeshett à l’hôtel, il m’offre une bière. Wubeshett est la personne qui m’a conduit dans son 4X4 de Konso à Yabelo. Il travaille pour une organisation AIDS comme ingénieur informaticien. Nous devons nous revoir à Addis Abeba.
02/12/08
Départ à 6h00 de Yabelo. A 30 Kilomètres de Dila, le bus s’arrête, crevaison. J’enchaîne par la suite avec un minibus, le trajet me semble long. Arrivée à Awassa vers 15h00, enfin une douche propre. Découverte du lac en fin de journée avec une multitude d’oiseaux dont le Martin Pêcheur et retour en bateau. Je croise en marchant un Ethiopien, Kifre, que j’avais croisé à Arba Minch. Je vais dîner dans un bon restaurant italien qu’il m’a indiqué.
03/12/08
Le marché au poisson se tient au bord du lac. L’agitation est intéressante, mais la vue du découpage des filets, du nettoyage à même l’eau du lac ne pousse pas à manger comme les locaux des filets crus avec du piment assis à l’arrière d’un taxi à trois roues que l’on nomme ici « bajaj » (c’est le nom du fabricant indien). Je découvre un petit marché dans la ville où j’achète à nouveau du café et un peu d’ail en me rendant compte que j’achète toujours de l’ail dans les pays exotiques. Je retourne dans l’après midi sur ce petit marché pour observer les joueurs d’un jeu proche du Bowling. Un des adolescents m’invite à prendre le café sous les tentes du marché au milieu des consommateurs de Khat. Après un petit tour autour d’une église monstrueuse au bout de l’avenue commerçante de la ville, je me rends au Lewi Hôtel. Rendez-vous avec Kifre rencontré la veille. Nous discutons une bonne heure. Deux pères Noël en plastique de taille humaine sont disposés respectivement à l’entrée de l’hôtel et au bar, mais je n’ai pas obtenu d’explication claire à ce sujet.
04/12/08
Réveil très matinal pour prendre le bus direction Addis Abeba. Je suis fiévreux et ma gorge est irritée. Le voyage est très pénible. Arrivé au Taïtu Hôtel, je file à la pharmacie avant d’aller me coucher. Je croise par hasard devant l’hôtel, Bingo, que j’avais rencontré à Arba Minch. Je reste au lit jusqu’à 18h00. Je n’ai pas la force de dîner l’extérieur.
05/12/08
Je crois que mon corps a atteint ses limites. Deux semaines dans des conditions difficiles (nourriture, hygiène, environnement climatique et déplacements en bus) semble être le maximum. Je me force à rester un peu plus au lit.
Je trouve des vitamines C dans une pharmacie mais l’effet n’est pas spectaculaire. Je me sens un peu drogué avec des petits vertiges dans l’espace mais aussi dans le temps. Après l’achat des dernières cartes postales, je file au Hilton pour me détendre dans un luxe un peu vieillot. Sieste obligatoire pour cet après-midi. Il est 18h00 et je décide d’aller au cinéma, l’Ethiopia Cinema est tout près de l’hôtel. Après une longue discussion, je suis obligé de laisser mon Leica dans un coffre. C’est un film d’espionnage américain. Au bout d’une heure la lumière se rallume pour un entracte. A la fin de la seconde partie, une cloche sonne et nous n’avons même pas le temps de voir le générique avant que la lumière ne se rallume. Je récupère mon appareil et demande le titre du film, il s’agissait de « Bourne Ultimatum ». Je rentre à l’hôtel, je crois avoir fait le maximum pour aujourd’hui.
06/12/08
La nuit fut meilleure et je me sens reposé. Direction le Merkato avec mon taxi préféré. Une heure suffit pour comprendre qu’il n’y a pas grand chose à y faire. Je n’arrive pas à joindre Thomas. Wubeshett doit venir me chercher à l’hôtel vers 13h00. En attendant et après avoir acheté un CD de Teddy Afro, je sirote un Coca Cola sur la terrasse ensoleillée de l’hôtel. Il est en retard car nous nous sommes mal compris sur l’heure du rendez-vous (l’heure éthiopienne ne s’organise pas comme la notre dans la journée).
Wubeshett me raconte l’histoire du père Noël et du calendrier éthiopien mais je ne comprends rien. Je lui raconte à mon tour cette lune étrange que j’avais observée à Yabelo. Seulement deux étoiles entouraient de part et d’autre la lune dans le ciel. Il s’agissait apparemment d’un phénomène astrologique rare. Après le repas nous revenons prendre un verre au Taïtu Hôtel.
En levant les yeux j’ai découvert la terrasse d’un café restaurant au-dessus d’un immeuble du quartier. C’est de là que je verrais mon dernier coucher de soleil sur Addis Abeba.
Mon chauffeur de taxi m’attend. Arrivé à l’aéroport, je suis surpris par le nombre de bébés qui prennent l’avion Lufthansa ce soir. Je prendrais bien une couchette si cela était possible.
A l’embarquement, je m’aperçois que tous ces couples sont espagnols et qu’ils ont chacun un bébé noir.
Ma bouteille d’eau ne pose aucun problème, on me demande juste d’en boire un peu. Je fais semblant de m’évanouir et cela fait beaucoup rire l’agent de contrôle.
07/12/08
Au réveil tous les bébés chantent ensemble pour dire qu’ils ont faim. A l’aéroport de Frankfurt, je rencontre Pawel, un ingénieur américain d’origine polonaise qui va passer une semaine chez Motorola ou Thomson à Toulouse.
La vue sur la campagne tarnaise de l’avion avec un soleil rasant et des brumes matinales dans les vallées est splendide. Atterrissage à 9h40 à Toulouse.